Mangeuse de vie

Pas de Cirque cette fois, juste quelques mots venus comme ça.
Un peu trop brouillon et flou pour être compréhensible, mais après tout - je me comprends.

Mangeuse de vie

Les couleurs dans ses yeux sont celles du sang d’abord, iris rouge comme ses genoux écorchés, puis bleue comme le ciel. Une couronne d’épine entre ses dents et sur sa langue des mots qu’on n’apprend pas aux enfants et qui font fuir les curieux.

Son simple plaisir d’être en vie ne connaît pas de limite. Qu’est-ce qu’une blessure de plus ou de moins ? Rouge dans ses yeux et sur sa peau, sur ses genoux et sous ses ongles.
Du rouge sur ses mains, sublime preuve qu’elle est en vie.

J’aimerais te montrer un rêve que j’ai fait.
Dans lequel nous nous satisfaisions de ce que nous avions.
Hélas, au matin réveillée,
Quelle déception…


Ce monde est devenu trop étriqué pour elle alors elle le dévore petit à petit. D’un sourire, d’un regard, d’un mouvement de ses hanches. Tout dévorer et ne rien laisser de ce qu’elle a connu, de ceux qu’elle a connu. De ce qu’elle a été. De ce dont elle vivait, avant. Tout ce qui était triste et gris, dégoûtant.
Ce monde la dégoûte assez pour qu’elle le mange, tout entier, avec le reste. Sa couronne d’épines finit de réduire en morceaux ce qui doit l’être avant qu’elle n’y morde à pleines dents, et c’est encore meilleur si elle s’y blesse au passage.
Du rouge dans sa bouche, délicieuse preuve qu’elle est en vie.

Elle tire sa langue écorchée et savoure la douleur en même temps que le reste. Ce qu’elle voit, personne ne le voit comme elle. Tout à l’envers, tout à refaire. Tout à manger, tout, elle le digère.

Jusqu’à son cœur entre ses mains, tout palpitant de vie et de sang, tout cabossé de vieilles tristesses et déceptions – tout à refaire. Ces souvenirs en noir et blanc, tout, elle les digère.
Le trou dans sa poitrine n’est pas un vide à combler ni une plaie à panser, c’est une porte grande ouverte aux espoirs futurs.
Elle l’embrasse d’abord comme pour s’excuser, ce cœur mis à mal tant de fois. Comme une promesse aussi, de ne pas laisser le prochain finir de cette façon, rétréci et lacéré par la sécheresse des douleurs passées.
Puis n’en fait qu’une bouchée. Sans la laisser aux épines.

Son propre sang coule à flots sur son menton et son cou.

Elle l’entend palpiter une dernière fois dans sa gorge, boum boum, si fort qu’elle n’entend plus rien d’autre pendant un long moment. Ça lui rappelle soudain qu’elle ne l’avait plus entendu battre depuis très longtemps ; le son du prochain, elle veut l’entendre à chaque instant.

Assez de ce qui était gris, triste et dégoûtant. Elle le digère.

Boum boum.
Ses ongles raclent les bords du trou dans sa poitrine et elle sourit.
Avec du rouge sur sa bouche, parfaite preuve qu’elle est en vie.

1 commentaires:

megu 2 décembre 2010 à 02:44  

C'est perturbant et si beau à la fois. En lisant ça on se sent...très mal, et en même temps plein de vie. C'est assez chaud à décrire en fait. Mais pour moi c'est un texte que j'aimerais lire encore et encore. ♥

Enregistrer un commentaire

InsomNight

Blog d'écriture de l'insomniaque qui se fait appeler Night : où vous trouverez mes univers, ceux dans lesquels je me perds et que j'essaye de partager à travers écrits et photos.

Univers

Le cirque Nocturne - Dans la salle, dans les coulisses, les spectateurs et les artistes : tous sont des monstres.
(Personnages : Mademoiselle, la Dompteuse, le Jongleur... )

Ignis Divine -
La magie, ses enfants, ses ennemis ; le feu, ce qu'il créé, ce qu'il détruit ; les Anges, ce qu'ils taisent et ce qu'ils sont.
(Personnages : Amadriel Itqal, Judicaël, Michaël... )

Détours de Babel - Le pays oublié de Dieu où les tragédies sont des contes de fées et les cimetières des royaumes. À moins que ce ne soit l'inverse ?
(Personnages :Hevad, Issaiah, Erebos, Nobody, Virgilia "Lia"... )