Cirque Nocturne : présentation de la troupe

Les personnages du Cirque Nocturne sont nombreux et peu ont été vraiment présentés. Une courte présentation de chaque membre sépare chaque partie de l'histoire. Voici les trois premières.

La Dompteuse

« Regardez la dompteuse, il n’y a aucun subterfuge, elle n’est pas montée sur échasses et ne doit sa taille vertigineuse qu’à la nature. Ses cheveux aussi sont impressionnants de longueur, de sombre profondeur, et recouvrent à eux seuls presque la piste entière. Aucune émotion sur son visage maquillé. »

Si Mademoiselle est là depuis le commencement, la Dompteuse vient tout de suite après. Seconde sur la liste, elle est en effet le premier monstre de Mademoiselle. Une géante taciturne à la beauté froide dont le visage bien loin du sol ne se froisse jamais d’aucune expression, aux cheveux noirs si longs qu’ils serpentent sur le sol comme dotés d’une vie propre presque partout dans le cirque. Il n’est pas rare d’y voir cachés quelques oiseaux apprivoisés prenant leur dompteuse pour une sorte d’arbre mobile sur lequel il est toujours permis de se poser.
Peut-être est-ce elle qui a inspiré le nom du cirque, avec son apparence et ses habits de scène rappelant toujours, d’une façon ou d’une autre, le ciel étoilé. Son corps immense et fin se perd dans des corsages et des dentelles noirs pailletés de façon à imiter quelques astres, d’interminables colliers de perles immaculées ou de croissants argentés. Et même sans parures, sa peau blanche prend un aspect lunaire jouant du contraste entre sa pâleur et le noir parfait de sa chevelure démesurée.

Monstre gigantesque silencieux et présent, statue de porcelaine parée de blanc et de bleu nuit, elle est l'ange gardien du Cirque. Son regard ne rate rien de ce qui se passe sous le chapiteau. Elle est toujours derrière la scène, presque fondue dans le décor, et n’en sort que rarement.
Entre ses mains passent toutes les créatures accueillies par le cirque, car sa patience et sa force proportionnelles à sa taille lui valent de pouvoir dompter et éduquer même les plus sauvages. Jamais elle n’élève la voix ou ne fait claquer son fouet sans bonne raison. Un coup d’œil de sa part suffit en général à faire revenir l’ordre.

Le Jongleur

Le Jongleur est une présence unique qui semble à la fois partout et nulle part. Sorte d’ombre noire de forme vaguement humaine qui apparaît et disparaît dans le cirque, il porte en guise de visage un masque blanc comme ceux des théâtres d’antan dont l’expression change à sa volonté – comme par enchantement. A-t-il un corps sous ce voile noir qui le couvre, un véritable visage sous ce masque ? Mademoiselle est sans doute la seule à le savoir.

Le moindre objet sur lequel s’attardent ses mains gantées devient instrument de jonglage et prétexte à improviser un spectacle. Il est rare, sinon impossible, de ne pas le voir en train de jongler et ce quoi qu’il fasse à côté.
On ne sait d’où il vient, mais lui semble tout savoir sur les autres habitants du chapiteau. S’il est une présence unique et angoissante, c’est qu’il apparaît toujours pour faire une révélation ou partager un brin de philosophie le plus souvent dans le but de semer le trouble comme un sombre fantôme de mauvais augure.

Le cracheur de feu, dit le Favori

« Des flammes naissent et meurent aussitôt dans la gueule de la créature gémissant de douleur au fond de la cage de glace. C’est le froid qui l’empêche de bouger, et la haine dans son regard est si forte qu’il semble n’attendre qu’une occasion de pouvoir à nouveau se mouvoir. »

Bien que son comportement ne soit pas différent qu’il s’agisse de lui ou du reste de la troupe, Mademoiselle rappelle à qui veut l’entendre que cette créature compte parmi ses préférés. C’est ce qui lui a valu le surnom de favori.
Son apparence est celle d’un être humain d’une trentaine d’années, mais il est difficile lorsqu’on le voit pour la première fois de le distinguer d’une bête sauvage. Pour une raison inconnue, il est capable de cracher du feu ou d’en faire jaillir de son corps, ce qui lui vaut d’être enfermé dans une cage de glace et entouré d’eau, pour l’affaiblir et l’empêcher d’user de ses dons sur les visiteurs. Il est le seul membre de la troupe à ne pas obéir à la Dompteuse, seule Mademoiselle peut s’en faire écouter. Lorsqu’elle quitte le Cirque, elle l’emmène parfois pour faire office de garde du corps.

Il n’y a qu’en présence de la lanceuse de poignards qu’il présente un côté plus civilisé, qu’il parle et se comporte comme un homme et non pas comme un animal.

Cirque Nocturne : quatrième partie

Le cirque fêtera le mois prochain sa première année d'existence, et je suis toujours aussi lente à la correction et relecture de ce que j'ai déjà écrit dessus. Pas très glorieux tout ça... Allez, au travail !

IV. Immersion
Les voix sur la scène

Le rideau n’est pas encore levé que déjà s’élève la voix de la chanteuse. Plutôt qu’une langue inconnue, peu à peu le chant se révèle être de longues syllabes sans sens. Il n’en est pas moins beau. La salle est plongée dans l’obscurité jusqu’à ce que s’allume une multitudes de chandelles sur la scène en guise de projecteurs. L’aspect de la diva révélée stupéfie les spectateurs ; sa peau, ses cheveux et même ses ongles, on croirait son corps tout entier fait de verre ou cristal poli. La moindre petite flamme se reflète sur sa peau miroitante pour en faire un étrange, splendide et effrayant chandelier vivant.
Parmi la foule on s’offusque, on s’émerveille, on s’interroge : comment une telle chose peut être possible - humainement, scientifiquement ?

Comme pour y répondre, Mademoiselle a rejoint la scène aux côtés de la chanteuse de verre et d’un doigt sur ses lèvres fait taire les voix qui avaient voulu se faire entendre. Silence. Appréciez.
Le chant monte plus haut et ressemble maintenant à celui d’un carillon, des notes métalliques comme une voix humaine ne saurait reproduire. N’y a-t-il pas plusieurs voix ? Non… il y a une sorte d’écho sur la scène qui créé un chœur imaginaire à partir de la seule voix de la chanteuse. Du haut du chapiteau descendent doucement des sphères de verres suspendues comme les décorations du sapin. Ah ce sont elles, en plus du corps même de l’étrange diva, qui font résonner cet écho unique. Les flammes des bougies dansent au rythme des respirations raccourcies, des ondes provoquées par le son ; le chapiteau tout entier devient l’intérieur d’une boule à neige musicale qu’on viendrait de retourner.

Le chant atteint bientôt des aigus rares et se fait plus plaintif. Une sphère de verre passe devant le visage de la chanteuse qui rouvre les yeux. L’expression de Mademoiselle a changé.

De l’obscurité apparaît une silhouette jusque là tenue éloignée des chandeliers dont on ne distingue vraiment qu’un masque blanc tout droit sorti d’un coffre de la Commedia dell’Arte et des mouvements brefs. On le croirait entouré de bulles éphémères mais ce sont ses mouvements qui les font bouger : le Jongleur.
Quelques applaudissements timides suivent son arrivée, qui s’étouffent aussitôt. Il n’est pas seul et dans son ombre se dessinent bientôt les contours de grandes ailes blanches comme celles d’une colombe. Non. D’un ange. C’est un ange que le jongleur tire derrière lui au bout d’une chaîne. Cinq paires d’ailes dans son dos et sur son visage l’expression de la douleur. Nouveaux murmures dans la salle – sont-elles vraies ? Il ne porte aucun costume pour dissimuler quelque artifice maintenant les ailes immenses, non, elles sont bien réelles et pèsent bien lourd sur les épaules de leur porteur dont les jambes tremblent et se seraient sans doute déjà dérobées s’il n’y avait le Jongleur pour le supporter.
Les bras grands ouverts, il chante à son tour.

La chanteuse ne s’est pas interrompue et peu à peu sa voix est couverte par ce chant plus fort que le sien, plus douloureux, rivalisant avec le sien dans des aigus impossibles. Trop haut, trop beau, il en est presque difficile à supporter. Beaucoup se bouchent les oreilles. Les sphères de verre répètent le son à l’infini, mais bientôt sa hauteur les fait éclater une à une.
Mademoiselle a un regard en direction de la chanteuse ; la gorge de celle-ci vient de se fissurer et son bras droit éclate en un millier d’éclats transparents. Pas de sang, juste des morceaux de verre épars sur la scène. Une grimace de douleur, mais c’est tout. Cela n’arrête pas la chanteuse, ni n’arrête l’ange. Duo étrange.

Leurs voix se mêlent peu à peu en une même plainte déformée par l’écho tordu que renvoient le verre et le cristal brisés. Le chant devient une arme, et sa beauté meurtrière. Dans la salle, les spectateurs en ont les larmes aux yeux – et les oreilles qui sifflent.
Les fissures s’agrandissent et se dispersent sur le corps fragile comme autant de veines sinueuses. Cela doit cesser.

Mademoiselle claque des doigts ; aussitôt jaillit de l’obscurité un long bras blanc dont la main se pose sur la bouche de l’ange pour le réduire au silence, et qui l’entraîne finalement loin des regards et de la scène. La chanteuse s’est tue, emportée par le Jongleur. Un silence hébété fait place au duel de voix douloureuses qui résonnaient encore quelques secondes plus tôt. Seule sur scène, la maîtresse des lieux fait une révérence et annonce le prochain numéro avec un sourire plaisant. Le spectacle reprend et peu à peu l’on se remet de ce moment de flottement, cet instant à la fois magnifique et cruel, en s’imaginant que cela faisait partie du numéro.

En coulisses, Mademoiselle gifle le Jongleur si fort que son masque en tombe par terre. Mais elle n’est pas énervée, au contraire son sourire est celui d’une enfant ravie ; l’expérience était trop intéressante et Mademoiselle aime tant tout ce qui est intéressant. Elle prévient juste le jongleur de ne plus mettre la vie de ses artistes en danger de la sorte sans l’en avertir plus tôt. Le masque sur le sol lui en fait la promesse avec un ricanement.

A la fin du spectacle, elle rejoindra le chevet de la chanteuse et ordonnera qu’on répare ce qui peut l’être sans que sa voix en pâtisse, pour qu’elle retourne sur scène le plus tôt possible. Ne pas atténuer la douleur, non, il en naît de telles beautés.

Mademoiselle passera la journée suivante à fredonner dans les couloirs et recoins du cirque endormi. Le duo improvisé lui a donné des idées de numéro qu’elle veut à tout prix voir se réaliser.

InsomNight

Blog d'écriture de l'insomniaque qui se fait appeler Night : où vous trouverez mes univers, ceux dans lesquels je me perds et que j'essaye de partager à travers écrits et photos.

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